Je voulais en parler, sans faire du larmoyant, et en dénonçant ce qui me paraît important. Mais je ne savais pas trop comment. Et puis j'ai juste écrit à une amie, et je trouve que c'est bien écrit, que j'ai bien expliqué mon ressenti et ma philosophie, alors voilà :
Côté attentats, c'est... tellement énorme et terrible que je ne sais plus comment réagir, quoi dire. "Les bras m'en tombent" : c'est exactement ce que je ressens. Le monde va mal, la terreur et la violence gagnent en Europe. Mais à vrai dire, ce qui me fait peur ce ne sont pas tellement les terroristes. Je les considère comme des fous, des psychopathes, et ça il y en a partout dans le monde, il y en a toujours eu, l'un d'entre eux peut me tomber dessus, ou sur mes proches, n'importe quand.
Non, ce qui me fait terriblement peur, ce sont les réactions de beaucoup de Français-es et autres Européen-nes : bien des gens se laissent complètement submerger par la colère, la haine, appellent à la guerre, aux représailles sur le monde arabe (c'est ça, aller massacrer des innocents va sûrement régler les problèmes de mésentente entre l'Europe et le Moyen-Orient hein), à l'expulsion des immigrés... bref bien des gens réagissent exactement de la façon qui ne peut que faire encore plus de mal, compliquer encore plus la situation, créer encore plus de dégâts, de douleur, de haine, de violence. Je pense aux immigrés du monde arabe en France (et ailleurs) qui vont avoir encore plus de problèmes, de stigmatisations, les jours et mois à venir... alors qu'ielles n'ont absolument rien à voir avec les terroristes et que la plupart ne veulent qu'une chose : juste vivre en paix, nourrir leurs familles, et ne pas avoir de problèmes.
Je vois les réactions des Occidentaux, et ça me terrifie, parce que c'est plein de racisme, d'intolérance, de haine, de violence... tout ce qu'il faut pour enclencher de la vraie grosse merde, du genre une véritable guerre. Le fascisme ne m'a jamais semblé aussi proche. C'est horrifiant.
J'ai eu une très bonne discussion avec un coloc hier à propos de tout ça, et on a quand-même réussi à aboutir à une conclusion positive : Tu te souviens, quand il y a eu Charlie, beaucoup d'artistes ont produit de magnifiques oeuvres en soutien à la France, à Charlie, à la liberté d'expression. Eh bien je me dis que c'est ça la meilleure réponse au terrorisme : ils veulent nous terroriser ?? Eh bien non, on n'aura pas peur. On sera tristes, immensément tristes face aux massacres, bien sûr. Mais on ne cédera ni à la peur, ni à la haine. On continuera de vivre, de parler, de s'exprimer, de rire, de créer. Nos vies seront plus fortes que leurs attaques. Et même, nos artistes, nos peintres, nos dessinateur-ices, nos musicien-nes, nos écrivains, nos photographes, et j'en oublie, réussiront à utiliser l'horreur elle-même pour en faire des oeuvres fortes et belles. Ils nous envoient de l'horreur, de la terreur ? Nous parviendrons à les transformer en force, en art, en beauté même.
Je vais essayer d'y participer moi-même. Je tourne dans ma tête une composition musicale sur ce sujet.
Et puis j'irai en France, je passerai à Paris si je le dois (généralement j'évite parce que je déteste cette ville, mais parfois je dois y passer, que ce soit avec les trains ou pour des concerts), je serai prudente (comme toujours) mais je ne m'enfermerai pas chez moi, ne restreindrai pas ma liberté à cause de la peur.
Et j'aimerais ajouter que mes pensées sont à Paris... et également à Beyrouth. Cette ville a subi des bombardements la veille des attentats à Paris qui, en raison de ceux-ci, ne sont presque pas couverts et relayés par la presse internationale. A cause des horreurs en France, les horreurs de Beyrouth sont proprement niées, oubliées, passées sous silence, ignorées.
Et je pense aussi à toutes les autres horreurs qui se passent de toute façon partout dans le monde, les personnes exploitées, martyrisées, violentées, agressées, violées, sous-payées, non respectées... bref, toutes les victimes de ce monde malade. Mes pensées sont pour elles toutes, tout le temps.