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17 juin 2015

Pourquoi l'agriculture ?

L'été dernier je gardais des moutons en Suède, cette année y'a aussi des moutons (mais je ne les garde pas, ils sont quasi sauvages), ça parle aussi germanique, mais je suis en Norvège. Scandinavie, quand tu nous tient... Je suis dans une ferme en wwoofing, donc pour faire un peu d'agriculture avec mes mains de musicienne qui perdent leur côté costaud à ne pas travailler dans la terre (il fallait remédier à cela). Donc retour aux sources avec des céleris, salades et chouraves à planter, des adventices (on ne dit pas "mauvaises herbes" quand on est poli-e) à arracher, bref du boulot agricole. Tout bio, quasi tout à la main. La base.

Et la question qu'on peut se poser, c'est : pourquoi l'agriculture ?

 

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Toutes les photos illustrant cet article sont de Brenda Runahild Dahl, dans la ferme de qui je suis.

 

Parce que l'agriculture, c'est la base de la vie. Ce que je vais dire va peut-être paraître totalement évident à certaines personnes (et tant mieux ! et bravo à elles), mais je pense qu'il est extrêmement important de le souligner, de l'expliquer, le dire encore et encore.

L'agriculture, donc, c'est la base de la vie. C'est elle qui fournit notre nourriture, et sans ça, pas besoin de dessin, on meurt. Elle fournit également bien d'autres choses, notamment le textile pour nous vêtir (je refuse de considérer l'industrie pétrochimique comme une alternative viable côté textiles, vu que cette industrie n'est PAS viable, et ne le sera jamais). Nourriture, vêtements : des choses essentielles.

 

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Donc quand je parle d'agriculture, ce n'est pas un loisir. Je ne fais pas ça parce que j'y trouve particulièrement de plaisir (quand il fait bon et qu'il faut juste tuteurer les petits pois, aucun souci, j'adore ça, mais aller désherber dans les orties sous des trombes d'eau, ce n'est pas particulièrement ce qui me botte, v'voyez) (et la botte, là, elle est carrément nécessaire) (pardon, c'est nul mais j'étais obligée). Je me suis mise à l'agriculture parce que j'ai compris que c'était ce qu'il faudrait que tout le monde fasse, en fait.

J'ai une hiérarchie mentale de l'utilité pratique, concrète des professions. Un-e médecin, un-e enseignant-e, tout le monde comprend que ce sont des professions importantes, utiles. Les cordonnier-es ou potier-es sont mal reconnus aujourd'hui, pourtant ce sont aussi des métiers absolument nécessaires à tout le monde (enfin, à la base ça l'est, mais vu que l'artisanat se prend dans les dents toute l'industrie, ces savoirs-faires sont aujourd'hui très peu reconnus) (ce qui me fait hurler, et c'est pour cela que je me bats pour l'artisanat, pour qu'il soit reconnu et encouragé, au lieu des industries). Mais banquier-e ? Vendeur-euse d'assurances ? Directeur-ice en management interne dans une entreprise de vente par correspondance ? On peut m'expliquer ce que ces personnes apportent concrètement aux autres ? Je ne peux pas manger mes relevés de banque, je ne peux pas me chauffer avec mes contrats d'assurance, et les catalogues ne vente par correspondance ne me sont d'aucun secours quand je me blesse. Comment est-il possible qu'un banquier reçoive mille fois plus de respect qu'un maçon ? Le banquier cherche à produire de l'argent (pour vous et pour lui, au maximum), le maçon bâtit les murs de votre maison...

Je m'égare un peu. Dans ma hiérarchie mentale, la profession qui a le plus d'utilité pratique, directe, concrète, pour l'humanité, c'est bel et bien l'agriculteur-ice, le cul-terreux, le péouze, la fermière, le berger, la gardeuse d'oies, le-a paysan-ne. Ce sont ces personnes-là qui nourrissent le monde. A ce titre, elles mériteraient du respect, tout le respect possible.

 

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Imaginons un peu... Une agriculture sans grosses machines. Il faut des gens pour herser, dépierrer, désherber, semer, conduire et garder les animaux, les soigner, pour planter, tuteurer, récolter... Beaucoup de gens, dans notre société et dans le monde entier, n'ont pas de travail, ou des boulots tellement abrutissants qu'ils broient la dignité d'un être, son inventivité, sa créativité, sa motivation à vivre, sa liberté évidemment. Si ces personnes, au lieu de chercher un travail abrutissant (ou inutile en termes concrets) ou d'en avoir un, allaient mettre leurs mains dans la terre, les pierres, le bois, le poil, le végétal... tout le monde aurait du travail, il y en aura toujours largement assez. Et si tous ces gens le faisaient, donc, et qu'aucune élite, d'aucune sorte, ne leur piquait les fruits de leur boulot (parce que la noblesse médiévale, l'aristocratie guerrière celte et romaine, les tyrans religieux d'un peu partout n'ont jamais rien glandé, se sont contentés de marcher sur les gens de la terre et de leur piquer la nourriture produite) (sans ces saligauds, on aurait une foule de bons exemples de systèmes agricoles prospères, équilibrés et heureux, où personne ne s'épuise ni n'a des conditions de vie et de travail misérables)... hé bien on aurait de la bonne nourriture. Produite dans le respect de la terre, du sol, de l'air et de l'eau. Bien suffisamment (on produit aujourd'hui plus de nourriture que nécessaire pour la population mondiale, le problème, c'est que bien des gens qui ont besoin de cette nourriture n'ont pas les moyens de l'acheter : le problème n'est pas agricole, mais bien économique) (et c'est pour cela que je tape sur les banquiers). En bossant, mais sans s'épuiser non plus. Pas d'ennui, et pas d'opression non plus. L'impression d'être utiles, utiles au bien commun, le sien propre et celui des autres en même temps.

Je suis convaincue, non, certaine, que cela est possible. Peut-être pas ici, pas maintenant, pas tout de suite, mais dans l'absolu, tant qu'on n'est pas dans une période glaciaire, se nourrir bien en travaillant raisonnablement et sans subterfuges industriels est réellement possible. Il faudra toujours se garder des tyrans décrits plus haut, parce que si on regarde l'Histoire, c'est bien toujours à cause de celleux-là que les sociétés étaient déséquilibrées. Mais si on imagine que c'est possible de les renverser avant qu'ielles ne fasse de dégâts (ou encore mieux, de s'éduquer de façon à ce que personne n'aie la pulsion de se conduire comme ça) (pendant qu'on est dans l'utopie, poussons-la au bout), c'est possible.

 

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Ce que j'aimerais vous dire avec ce message un peu fouillis, c'est : prenez conscience de l'importance de l'agriculture, qui nous fournit la base de notre vie. Et même si vous n'avez pas d'argent (c'est mon cas), donnez-lui quelque chose qui ne coûte rien et que nous avons tou-tes : du temps. Quel que soit votre métier, votre âge, votre situation de ci ou de ça, allez vous frotter à l'agriculture. Participez à ce qui devrait être l'effort général de tout le monde : la production de nourriture.

Entrez dans une AMAP (paniers de légumes réguliers à un prix très bas en échange de quelques jours de travail et de votre engagement à être client-e de la ferme pour une durée déterminée). Allez faire des stages de permaculture. Aidez le voisin de votre grand-mère campagnarde à déplacer ses moutons d'un pré à l'autre. Allez faire les vendanges une fois dans votre vie. Faites votre service civil dans quelque chose en rapport avec l'agriculture. Acceptez ce contrat de trois semaines comme ouvrier-e agricole si vous êtes au chômage. Voyagez grâce au wwoofing (travail agricole en échange de logement, nourriture et formation en agriculture écologique). Ou même, simplement, montez un potager (même sur un balcon ! même rien que des herbes aromatiques, c'est un début !), mangez vos salades, et allez en offrir aux voisins quand vous en avez trop.

Vous toucherez un peu à la base de la vie. Oui, c'est dur. C'est dur aussi parce que l'agriculture d'aujourd'hui produit pour nourrir les citadins, de tous les gens qui ne produisent pas de nourriture (ou d'artisanat) (ou d'autres choses importantes comme les bâtiments, etc.)... alors essayons de ne pas trop grossir les rangs de ces derniers. Grossissons au contraire les rangs des producteur-ices, au maximum ! Si vous vivez cela, vous saurez d'où vient votre nourriture, ce qu'elle implique comme efforts, comme travail, comme processus. Et même si vous retournez à une vie citadine ensuite, vous aurez ouvert votre conscience à ce propos. Vous aurez participé, même un petit peu...

 

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Bons doigts dans la terre, petites graines de consciences !

Et un peu de trad' suédo-celtique pour accompagner tout ça :

Olov Johansson et Catriona McKay

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Commentaires
L
C'est la one-woman-band Eliwagar en fait :<br /> <br /> http://eliwagar.no/contact/<br /> <br /> <br /> <br /> Il suffit de la contacter, en français ou en anglais, elle est très chouette (mais met parfois du temps à répondre, car il y a beaucoup à faire dans sa vie !). La ferme est petite, entièrement bio, presque 2h de bus de Bergen, ça parle principalement anglais, les wwoofers sont très bien accueilli-es, l'ambiance est top (mais en espérant que vous n'êtes pas sensibles au bordel !! ni aux tiques, évidemment).
G
Le pied (botté :p) cet article !<br /> <br /> Et je vais trop rien dire mais faire du wwoofing en Norvège, c'est un projet que je nourris depuis quelques mois, dès que j'ai fini ma formation ici XD impression de chemins parallèles ^^ !<br /> <br /> <br /> <br /> Pour l'instant, je vis en appartement et j'ai simplement du basilic (qui est trop content) et une aloe vera (qui a une tête bizarre mais que j'aime d'amour ^^), mais je déménage incessamment sous peu et j'espère être un peu plus au contact de la terre (même si je vais souvent en forêt, toussa, c'est pas de l'agriculture) !<br /> <br /> <br /> <br /> Bref merci pour cet article qui motiiiive :) !!
C
Non , ni les pieds ni le doigt - j'habite en ville en france mais la tête plutôt oui, et je ferais bien de me recaler un peu plus avec mes convictions , mais pour le moment je n'y arrive pas - pour différentes raisons - toujours est-il que quand je lis ton article je respire !
C
Ton article me fait tellement plaisir La Chevelue !!!
C
je vais encore être un casse couilles, mais l' agriculture que nous décrit notre chère Chevelue, mon grand père ( j' ai appris à monter sur sa jument) la pratiquait; il fallait de la main d' oeuvre, mais c' était celle des enfants de la ferme; on a bien apprécié un certain progrès, moins la suite<br /> <br /> mais il est dans l' ordre des choses que les jeunes cultivent la contestation du système et rêvent<br /> <br /> toutefois les idées dont ce rêve vient ne sont pas apparues ex nihilo; elle viennent de vieux cons tels:<br /> <br /> Jean Pain<br /> <br /> Dominique Soltner<br /> <br /> André Pochon<br /> <br /> François Dufour<br /> <br /> Pierre Rabhi<br /> <br /> lesquels savent la réalité de la terre
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