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La Chevelue
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8 avril 2015

Genre, t'es une fille ??

Aujourd'hui c'est la naissance de Claude. Ses parents sont très fiers d'avoir mis au monde leur premier enfant. C'est un petit bébé qui ne pèse pas lourd mais se porte bien et gigote avec entrain. Sa mère lui enfile son premier pyjama. Jaune, car c'est sa couleur préférée. Son père prend des tas de photos en souriant d'un air un peu bête au bout de chou qui essaie de garder les yeux ouverts sur ce monde nouveau. Pas facile. Car Claude devra tout bientôt faire face à son destin.

Son destin, c'est le rôle qu'on va tout bientôt lui assigner à vie : ce que Claude a entre les jambes décidera tout pour cette petite personne. La couleur du papier peint de sa chambre. De ses jouets. De ses vêtements. La longueur de ses cheveux. Mais aussi et surtout, de son comportement. Si Claude est un garçon, on attendra de lui qu'il soit dynamique, combatif, énergique, et qu'il aime les outils de bricoleur et les tracteurs. Si Claude est une fille, on attendra d'elle qu'elle soit douce et rêveuse, qu'elle se laisse faire en restant bien sage, et qu'elle aime les princesses et les paillettes. Je ne vais pas plus loin, vous avez compris. A l'école primaire, puis secondaire, puis au lycée, dans les activités extra-scolaires, puis dans la formation professionnelle et enfin dans son ou ses métiers, dans sa vie amoureuse et amicale, et jusqu'à sa mort, tout, absolument tout sera classifié selon cette norme binaire.

Comme ça l'est pour tout le monde dans notre société.

 

theorie-du-genre

C'est choquant ? Pas vraiment, hein ? ^^ Trouvée chez le CorteX.

 

Maintenant relisez l'histoire du début et dites-moi quel est le sexe de Claude. C'est impossible, j'ai volontairement gommé tout indice permettant de l'identifier. Et est-ce que ça vous choque ? Avez-vous essayé, même inconsciemment, de dire "il" ou "elle" à cet enfant fictif ? Est-ce que c'est important, de savoir le sexe d'un bébé qui de toute façon n'est pas encore sexué, physiologiquement parlant, puisque les caractères sexuels, nous le savons, n'apparaissent qu'à l'adolescence (je ne parle pas de la forme du robinet qui sert à pisser mais bien de ce qui nous permet de nous reproduire) ?

A-t-on vraiment besoin d'enfiler à un bébé fille un pyjama rose et à un bébé garçon un pyjama bleu ? De donner à la première des poupées à paillettes et au second des tracteurs à roulettes, et ce dès qu'ielles sont en âge de jouer avec ? Et surtout, de leur coller sur le dos des attentes genrées dès le plus jeune âge : "pleure pas comme une fille", "sois gentille et sage", etc. ?

 

théoriedugenreappliquée

Là par contre, c'est carrément pas sympa... Trouvée chez les Observateurs.

 

 

Une longue introduction pour dire que je suis contre le genre.

Etant très intéressée par ce que l'on appelle les "sociétés traditionnelles" (notamment les Amérindiens et les Inuits ainsi que les différents peuples de Sibérie), je reconnais que la répartition de la société en deux genres peut avoir son utilité (chez les Inuits, tout est basé sur la dualité homme-chasseur et femme-couturière : s'il manque l'un ou l'autre, une famille ne peut pas fonctionner).

Mais je sais aussi que dans une société comme la nôtre, où nous possédons la contraception, qui est un moyen pour les femmes de ne pas rester bloquées à s'occuper d'un nouvel enfant tous les ans (ainsi que le système de crèches et d'études qui est en place)... bref, dans une société où nous pouvons nous affranchir des différences biologiques, eh bien, le genre ne veut plus rien dire.

On nous classe dès le plus jeune âge dans une case qu'on nous force à occuper, parfois sans problèmes, mais bien souvent contre notre gré. Je ne connais je crois pas une femme qui se sente correspondre à toutes les normes de la "féminité", ni un homme à toutes celles de la "virilité". Madame Bidule aime faire du taekwondo et monsieur Machin admire la broderie de très près. Si la première peut s'adonner à sa passion grâce à des décennies de lutte pour que les femmes aient les mêmes droits que les hommes (ce qui n'est largement pas acquis, cf. les salaires moyens français, au hasard), le second doit lui satisfaire son plaisir esthétique presque en cachette. Dans cet exemple-là, le problème va dans un sens (si toutes les femmes de notre société occidentales portent des pantalons sans problèmes, les hommes en jupe sont extrêmement rares). Dans d'autres cas de figure, il ira dans l'autre. Peu importe : le genre qu'on nous colle ne nous correspond pas.

Il ne PEUT pas nous correspondre, car nous sommes des individus complexes et tout le monde est différent. Si j'aime la couture, j'aime aussi l'escrime, sans y voir de dissonance. Mais la société bien-pensante cherche à me le faire croire. On me dit depuis toute petite que je dois être féminine. Comme si je devais prouver par tous les moyens possibles que je suis une femme. Pourquoi ? Ne suffit-il pas que mon système reproductif soit composé d'un utérus et d'ovaires ? Dois-je noter ce fait sur mon front, en plus qu'il soit indiqué sur mon passeport ? Dois-je ponctuer chacune de mes phrases d'un "je suis une femme", alors même que notre langue le fait déjà sans que je ne lui aie rien demandé, juste par sa grammaire (et, si j'adopte au maximum les tournures de phrases non-sexistes, je ne me sens pas de taille à révolutionner complètement une langue que, par ailleurs, j'aime telle qu'elle est) ?

Je pense que, par la hauteur de ma voix, ma silhouette, la finesse de mes mains et mon absence de barbe (en plus de la grammaire française, donc), la personne à qui je parle a suffisamment d'indices pour savoir si je suis XX ou XY. Et en fait, j'aimerais que cette personne ne se pose pas la question (et ce, même s'il n'y a pas d'indices genrés nets). Qu'elle me parle comme à un être humain en général, ou comme à La Chevelue en particulier. Je n'aimerais pas qu'elle me parle comme à "une personne d'origine polonaise" par exemple, ce serait du racisme. Alors pourquoi devrait-elle me parler comme "à une femme" ? Il m'est arrivé, rarement mais tout de même, qu'on me parle au masculin. Ca ne m'a pas dérangée une seconde. Tant que c'est à moi qu'on parle, on peut aussi me parler au pluriel, ou au neutre si on est en allemand, je m'en cogne. La faute de grammaire n'a aucune importance tant que l'on me parle à moi, et avec respect. Je connais aussi des hommes à qui l'on parle relativement souvent au féminin (une histoire de cheveux longs ^^), et qui le prennent exactement de la même façon (et ce malgré la vive confusion de leur interlocuteurice en se rendant compte de la méprise). Parce qu'ils ont le même avis à propos du genre.

 

Je ne correspond pas aux clichés et normes de mon genre par bien des côtés (j'énumère ? non, ce serait trop long, trop chiant et sûrement aussi trop personnel). Du coup, qu'on essaie de me forcer à rentrer dans cette case pendant des années m'a rebellée. J'ai fait du rejet pendant très longtemps, allant par opposition du côté masculin autant que possible. Et puis j'ai fini par me rendre compte que c'était absolument stupide de tuer certaines parties de moi parce qu'elles correspondaient à ce cliché que je déteste (et puis de toute façon, c'était impossible, chassez le naturel, il revient au galop). J'ai fini par tout prendre en vrac, tout moi, toutes mes composantes, qu'elles soient socialement classées dans l'une ou l'autre case, et par dire un gros merde au genre.

Le fait que je sois une femme n'est que l'une de mes caractéristiques parmi d'autres. Elle est importante du point de vue de ma biologie, par exemple je dois faire attention à mon taux de fer quand j'ai mes règles, et mes pantalons sont plus larges aux hanches que ceux d'un homme de la même corpulence et taille que moi. Mais dans ce qui me définit niveau personnalité, elle n'a pas d'emprise. Je suis agronome, je joue de la musique, je danse, j'ai de longs cheveux, je fais de l'escrime, je suis grande, j'ai une tête de bois parfois, j'aime la Nature, je suis une femme, je vis en Suède, je parle souvent trop vite, j'aime l'Histoire, je fais de la couture, j'aime la musique baroque et le metal. C'est perdu au milieu du reste. Ca a sa propre importance, comme je l'ai dit, mais pas plus que ça.

 

mulan - Copie

Parce qu'elle est toujours aussi cool.

 

Et ce que j'aimerais, c'est que les gens soient plus libres quant à leur genre. Que tout le monde arrête de se définir en fonction de ça. Mon ami le Truc dit que c'est un moyen de ne pas avoir à choisir (mon bébé est un garçon, j'achète le pyjama bleu sans me poser la question de peut-être que le rose me plairait mieux) (d'ailleurs c'est une grosse stratégie marketing que de genrer les produits, mais d'autres l'ont traitée beaucoup mieux que moi). Et c'est vrai, peut-être parce que le choix fait peur. On nous assomme tellement de partout avec des choix prédécidés ("il faut porter ceci parce que c'est la mode", "cette voiture est classe alors que celle-ci est un flop", etc.) qu'au final, quand on a le choix, on en a peur. On ne sait plus trop comment décider par soi-même (et là j'ai le cliché de la femme très genrée qui fait du shopping avec une amie et, incapable de se décider pour la robe bleue ou la verte, va demander l'avis de son amie, ou de la vendeuse, au lieu de choisir par elle-même quelle robe elle préfère).

Je ne juge donc pas (enfin, j'essaie :P) mes contemporain-es genré-es. Je sais à quel point c'est difficile de prendre de la distance d'avec la case du genre, surtout quand elle nous est assenée avec autant de force depuis toujours (je me bats très souvent, contre les autres mais aussi contre moi-même). Mais je suis certaine que ça vaut le coup. Les femmes se sont battues des années pour pouvoir porter elles aussi un pantalon, mais maintenant c'est un acquis (dans nos pays en tout cas, je ne fais pas dans l'international, je ne suis pas du tout assez calée) : elles ont la liberté de choisir entre la jupe ou le pantalon. Et c'est formidable !

Quand je passe dans la rue, j'essaie d'imaginer un monde où on aurait le choix. Où peu importe ce qu'on aurait entre les jambes, on pourrait choisir de porter ceci ou cela, d'avoir les cheveux comme ci ou comme ça, de faire tel métier ou tel autre, de parler de ce sujet comme de celui-là. Et je me dis que ce serait un monde infiniment plus intéressant, plus riche, que notre actuel monde bicolore. Chaque personne pourrait exprimer ce qu'elle est réellement, sans se demander si ça rentre ou pas dans la case qu'on lui a assignée en même temps que ce fameux pyjama rose ou bleu.

 

Puisque je ne sais pas parler de quelque chose sans utiliser des tas et des tas de mots, si vous n'avez pas compris, ou si ça vous intéresse, je vous recommande chaudement la page d'Insolente Veggie à ce sujet.

Et du Corvux Corax pour faire le plein d'énergie.

Je serai très contente de lire vos réactions, idées et témoignages à ce message en commentaires !

 

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Commentaires
A
Je viens de découvrir cette photographe, ça m'a fait penser à ton article : http://www.konbini.com/fr/inspiration-2/serie-photo-strong-new-pretty/<br /> <br /> <br /> <br /> J'ai l'impression que penser son genre est nécessaire à un moment donné parce que ça me paraît un stade normal du développement de l'enfant de se rendre compte qu'il y a des différences morphologiques entre lui/elle et les autres, et qu'on apprend à un moment donné le jeu de la séduction. Ce qui me semble primordial en revanche c'est de comprendre que les genres ne sont rien d'autre qu'un des masques artificiels créés par le contexte de la vie en société, et qu'on peut les déconstruire pour définir son genre à soi, selon ses propres critères, qu'on y mette le mot "femme"/"homme" ou pas... Que sais-je, les possibilités sont infinies et dépendent de chacun !<br /> <br /> <br /> <br /> Si on ne ressent pas le besoin de se définir tant mieux, c'est sans doute plus sain... mais personnellement, j'ai le sentiment que tant qu'on vivra en société, il y aura des formes de genre.
C
la tolérance éducationnelle vue par les intéressé(e)s: http://xxy.fr/ledito-de-fevrier-2015-la-tolerance-sort-de-la-bouche-des-enfants/
M
Tiens ma journée d'aujourd'hui m'a donné envie de réagir à nouveau... en fait je bosse en tant que commercial mais dans le bâtiments... en gros je suis la seule femme de l'entreprise. Et bin je peux dire qu'on m'a regardé de travers! <br /> <br /> Et aujourd'hui deux fois de suite on m'a dit "ho ba dite donc une femme dans ce métier ça doit pas être facile" "ho mais c'est pas un métier de femmes" <br /> <br /> Mais nondedious de bor*** c'est marqué où que y a des métiers de femmes ou d'hommes? Parce que pas de bol mes parents on oublié de me prévenir... et encore plus exaspérant qu'une femme dans un millieu d'hommes? Une femme qui caracole en tête dans un métier d'hommes! <br /> <br /> bon malgré tout... j'aime pas vraiment ce que je fais mais malheureusement je n'ai pas réussi à trouver dans ma branche...
C
méfies toi un peu de ce que tu reblogues: les observateurs.ch est un site politique français mis à l' abri dans la république de Genève, avec une tendance au minimum ultra catholique, voire pire...<br /> <br /> Calvin et l' inquisition font bon ménage......
E
Dans les sociétés "traditionnelles" (si tant est qu'on puisse les unifier), il y a plein d'exemples au contraire de changement de genre. Les vierges jurées en albanie, les berdaches chez les indiens d'Amérique, et pour reprendre ton exemple chez les inuits quelque soit leur sexe les enfants naissaient parfois avec un genre différent (si un ancêtre de genre masculin se réincarnait dans une petite fille par exemple, à la puberté elle re-change de genre, et après la ménopause elle redevient masculine). En Afrique aussi il y a des exemples comme ça. Le genre n'est pas une question de contraception, c'est une question de culture et de société, d'idéologie, etc. Ça existe partout, de différentes façons, avec différents systèmes de normes. Chez nous effectivement ya du boulot pour arriver à un certain idéal de société où l'on est pas un garçon ou une fille, on EST, point. Ça prendra des générations pour changer. Ya encore du chemin...!
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